Centrale des services à domicile

Interview de Marjorie Dodeigne
Chargée de Relations, Centrale des services à domicile
La Centrale de services à domicile (CSD) fait partie du réseau Solidaris. Sa mission : procurer le plus rapidement possible, des services d’aide à la personne en accompagnement à domicile. La CSD propose pas mal de services : aide familiale, soins infirmiers, garde répit, garde à domicile, gardes d’enfants malades, livraison de repas, location de matériel médical, télévigilance, etc. Elle a aussi mis en place un centre de coordination pour organiser le suivi du patient au domicile, et elle travaille en partenariat avec les indépendants pour mettre en relation les patients et les professionnels (Kinés, logopèdes, pédicures, esthéticiennes sociales, etc.)
Comment définiriez-vous l’accessibilité aux soins de santé ?
L’accessibilité aux soins de santé c’est la possibilité, à la fois financière et motrice de la personne, de pouvoir accéder à certains services qui sont liés à la santé. C’est la définition que j’en donnerais. Mais pour que ce soit possible, il faut aussi qu’il y ait du personnel qualifié en suffisance et malheureusement ça fait défaut actuellement. Il y a vraiment une pénurie dans certains métiers comme les soins infirmiers, les aides familiales. Il faut rendre ces métiers attractifs et les revaloriser.

Est-ce que vous pensez que les Sérésiens ont suffisamment accès aux soins de santé ?
Malheureusement non (pas pour tout le monde). Tous les jours quand on va voir les patients au domicile, on est confrontés au fait qu’il faut faire un choix entre différents services. Et ça arrive dans plein de situations. J’ai travaillé au centre de coordination où nous accompagnons le patient pour mettre en place un encadrement de soins adaptés à la maison, et c’est une difficulté permanente. Le patient doit tout le temps faire des choix, alors qu’il y a des besoins. Tous les services ne sont pas financés. Dans pas mal de situations, nous allons vers le CPAS pour voir si une prise en charge financière peut être mise en place de manière assez régulière, mais ça n’aboutit pas toujours à une réponse positive.
Qu’est-ce que ça pose comme problèmes selon vous ?
On se retrouve souvent avec des patients qui ont vraiment besoin d’une aide à la maison et qui doivent faire un choix. Mais ça pose problème chez nous aussi. Le patient, s’il n’a pas accès à d’autres services, il peut, par exemple, en demander plus à l’infirmier(ère) que ce qu’il/elle peut faire. C’est-à-dire qu’il va demander à l’infirmier(ère) d’aller chercher un pain et il/elle va se dire « si je ne vais pas chercher du pain, personne ne va pouvoir y aller et la personne ne va pas manger ». Ça met notre personnel en difficulté. Ce qui arrive aussi c’est le patient qui n’a pas assez de revenus pour payer un service suffisant, donc il va payer une aide familiale deux fois par semaine, alors qu’il aurait besoin de plus. Elle va donc se dépêcher pour faire le plus de tâches possibles dans un temps réduit. Ça a pour conséquence que le personnel s’épuise en travaillant.
Ceci ressort d’une étude de l’Observatoire social européen de juillet 2020 : « Parmi les 20 % de la population belge aux revenus les plus faibles, 6,7 % d’individus ne peuvent pas satisfaire leurs besoins en soins médicaux en raison de leurs coûts, alors que chez les personnes avec des revenus plus élevés, ce pourcentage est très faible : il est proche de zéro pour plus de la moitié de la population avec des revenus plus élevés. » Qu’est-ce que cela vous inspire ?
Moi ce qui m’interpelle surtout c’est que finalement l’accessibilité aux soins de santé a toujours été un problème pour une partie de la population. Et il semble que pour le moment, le prix de tout augmente de manière exponentielle. Ils doivent finalement prioriser les domaines auxquels ils peuvent avoir accès. Et pour certains, l’accès aux soins de santé ne fait pas partie de leurs priorités. Malgré qu’il y ait quand même un besoin, il y a d’autres choses à financer comme les factures d’énergie etc. C’est comme ça qu’on se retrouve en soins à domiciles, à s’occuper de patients atteints d’un cancer de stade 4 car ils n’ont pas consulté à temps, faute de moyens.

Que fait la CSD pour améliorer l’accès aux soins de santé ?
Nous avons mis en place notre centre de coordination avec des assistantes sociales qui sont présentes pour orienter le patient au mieux, dans ce qui sera le moins coûteux et le plus adapté pour lui. Nous prenons en charge les patients de toutes les mutuelles. On essaie vraiment de s’adapter à chaque situation.
Afin de faciliter l’accès aux professionnels sur la commune de Seraing, nous organisons aussi une journée de rencontre avec les professionnels. Elle aura lieu le 31 mai prochain.
Quelles sont, selon vous, les améliorations possibles afin de faciliter l’accès aux soins de santé pour les Sérésiens ?
On constate vraiment que l’aspect économique peut être un frein. Je fais partie de pas mal de groupes de travail en dehors de la CSD sur la région de Liège. Il y a énormément de choses qui se font, mais ce n’est pas toujours simple de rassembler et de donner accès à l’information.
Par contre, on voit aussi que le côté digital de l’accès à l’information peut être une réelle difficulté pour une partie de la population qui n’a pas accès à internet ou qui ne s’y connait pas du tout dans le digital. On le voit déjà pour télécharger le covid safe ticket par exemple.
Et donc le travail c’est d’aller à la rencontre du patient pour pouvoir leur procurer des soins. C’est vrai que si on ne va pas à leur rencontre, ils peuvent trainer pour faire les soins nécessaires et on les retrouve vraiment quand ils sont en grande difficulté.